Depuis le 2 septembre, le théâtre de Poche Montparnasse accueille « Les Justes », la pièce d’Albert Camus mise en scène par Maxime D’ABOVILLE avec la compagnie des Fautes de frappe. Cette compagnie est formée d’anciens élèves de Maxime D’Aboville qui ont challengé le comédien afin qu’il les mette en scène.

Russie. 1905. Quatre terroristes préparent un attentat contre le grand-duc Serge. Dora prépare la bombe. Son amant, le fougueux Yanek, s’apprête à lancer la première. Il est plein d’espoir et de dynamisme. Stepan, sorti de prison, se dit prêt à le remplacer afin de concrétiser au plus vite les idées du parti. Annenkov refuse. Le jour de l’action arrive mais tout ne se passe pas comme prévu… 

Cette pièce écrite en 1949 est tirée d’une histoire vraie souvent méconnue. Certains ont vu en les personnages de Camus une métaphore des résistants car c’est en effet une volonté de refuser l’ordre établi que portent les personnages dans ce huis clos inquiétant. Peut-on accepter les crimes les plus atroces dans le but de défendre ses idées ? Doit-on aller au bout, même au risque de faire des victimes innocentes ? Où faut-il poser ses limites ? Le terroriste en a-t-il ? Faut-il se battre pour sauver le peuple au présent ou pour aider les générations futures ? Jusqu’où peut-on aller pour ne pas trahir ? Comment faire confiance réellement aux gens qui nous entourent ? Tant de questions que pose Albert Camus et qui semblent tout à fait ouvertes à une lecture moderne. Il parait alors important de remettre en lumière de tels textes alors que le terrorisme prend de nouvelles formes. 

Les personnages se retrouvent enfermés dans une pièce un peu sombre afin de mieux se dissimuler de la lumière et du pouvoir qu’ils veulent combattre. Chaque acte se déroule en intérieur comme pour mimer l’enfermement dans lequel ils se trouvent, malgré leur volonté de faire bouger les choses, respectant presque la règle de l’unité de lieu. L’action extérieure se passe hors champ, comme dans les tragédies où l’on cachait jadis les scènes trop violentes. On découvre des personnages déterminés, impliqués au plus haut point dans leurs idées et n’ayant peur de rien. 

La mise en scène joue sur les lumières et les musiques qui accompagnent nos personnages dans leur soif de justice. Le public est transporté entre ombres, silences, lumières partielles, bruits brutaux, mélodies, afin de créer une véritable ambiance de révolte froide mais vive. Les costumes sont dans les tons marrons, gris, beiges, blancs. On pourrait presque y trouver un aspect cinématographique, plaçant habilement le récit dans son époque. Les lumières lors des scènes en prison ainsi que les sons des voix y sont astucieusement travaillées pour offrir au spectateur une sensation presque immersive. 

Les quatre comédiens présents au plateau apportent leur énergie et leurs émotions aux personnages. Deux d’entre eux interprètent plusieurs rôles aux caractères opposés, la pièce comportant initialement six personnages. Cela permet un questionnement plus poussé sur l’histoire en elle-même. Que se passerait-il si Dora et Stepan  étaient nés de l’autre côté ? Les inégalités à la naissance ne créent-elles pas, à elles seules, les luttes d’aujourd’hui ? 

« Les Justes » est une pièce définitivement très actuelle qui met en valeur de nombreux enjeux, servie par une troupe vibrante. Un spectacle à (re)découvrir. 

Audrey C.

Mise en scène Maxime D’ABOVILLE

Avec :  Arthur CACHIA, Étienne MÉNARD, Oscar VOISIN, Marie WAUQUIER

Costumes et scénographie : Charles TEMPLON assisté de Pixie MARTIN
Création sonore : Jason DEL CAMPO
Toile peinte : Marguerite DANGUY DES DÉSERTS
Lumière : Alireza KISHIPOUR

Production Théâtre de Poche-Montparnasse

OU ? au Théâtre de Poche-Montparnasse, 75 boulevard du Montparnasse, 75006 PARIS

QUAND ?  Jusqu’au 23 novembre 2025

DU MARDI AU SAMEDI À 19H – DIMANCHE À 15H

Tarifs : de 25€ à 32€

Durée : 1h15 

https://www.theatredepoche-montparnasse.com/spectacle/les-justes

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