
Depuis le 26 août, le théâtre des Béliers accueille « Le gros qui fume comme une cheminée en hiver », la nouvelle création d’Élodie Menant et Gaston Ré. Après « Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty » et « Je ne cours pas, je vole », après un succès à Avignon cet été, la troupe pose ses valises à Paris.
Juan, animateur radio et auteur à succès, se laisse vivre et oublie sa santé. Sa femme décide de le quitter mais de ne pas en parler de suite à leur fille pour ne pas la perturber. Un soir de match de foot Argentine Paraguay, Juan lance un pari stupide et le perd. Il va devoir retrouver sa nation d’origine pour l’honorer. Et à partir de là, les hasards vont s’enchaîner…
L’histoire qu’ont choisi de raconter Elodie Menant et Gaston Ré est vraie. Et pourtant, à chaque rebondissement, le spectateur va être surpris d’un tel enchaînement de coïncidences et de retournements de situations liés au hasard. Ainsi, le public se prend au jeu avec les comédiens de s’interroger sur les probabilités de telles circonstances. Les acteurs brisent régulièrement le quatrième mur comme une pause dans l’action, non pas de façon factice mais pour faire réfléchir le spectateur et lui permettre d’apprécier l’incongruité de la situation, pourtant bel et bien réelle. Ainsi, l’audience rit, se questionne, devient complice des personnages avec l’envie délicieuse de voir ce qui les attend. Les choix que nous faisons ne sont-ils guidés que par notre simple volonté ? Qu’est-ce qui régit les rencontres ? Pourquoi ce qui paraît anodin nous amène parfois à un bouleversement total de nos vies ?
La mise en scène et la scénographie sont particulièrement efficaces. Une structure en trois parties bouge et se module au fil de l’histoire pour figurer les différents lieux de l’action : la maison de Juan, l’hôpital, le air bnb… On constate une utilisation astucieuse de l’espace scénique divisé en plusieurs parties permettant justement une meilleure visualisation des lieux. Les comédiens déplacent eux-mêmes les éléments de décor, ce qui apporte du rythme au récit et dynamise l’action. Les lumières et les musiques sont savamment utilisées pour mettre en avant un moment ou accompagner une action.
Outre leur rôle principal, les comédiens en interprètent plusieurs à la fois, changeant de costume en une fraction de seconde. Cela fonctionne très bien. Et on s’attache particulièrement aux personnages principaux : Pierre Bénézit (déjà applaudi dans « Edmond » ou « Numéro deux ») présente un Juan drôle mais touchant dans son changement de vie, Lauriane Escaffre forme un duo irrésistible avec Marc Pistolesi dans leurs rôles respectifs de Carla et Augustin, Floriane Vincent est une Maria hilarante. Ils prennent possession du plateau et du récit avec délice. Le public a envie de les suivre, de découvrir leurs péripéties si abracadabrantes qu’elles ne peuvent qu’être vraies. On se laisse également porter par l’émotion que cette histoire révèle : celle d’un homme qui repart à zéro quand sa vie semblait perdue, celle des mains tendues qu’on n’attendait pas, celle d’un amour paternel plus fort que toutes les frontières, celle d’une deuxième chance possible. Le spectateur ressort plein de tendresse et de joie de vivre.
« Le gros qui fume comme une cheminée en hiver » est une pièce surprenante, pleine de rebondissements et de belles valeurs. Un bon moment à vivre… par hasard ou pas !
Audrey C.
Écrit par Élodie Menant & Gaston Ré
Mise en scène d’Élodie Menant
Avec : Pierre Bénézit, Lauriane Escaffre, Marc Pistolesi, Floriane Vincent
Assistante mise en scène Hélène Degy
Lumières Cyril Manetta
Musiques Mehdi Bourayou
Costumes Bérengère Roland
Scénographie Juliette Azzopardi et Jean-Benoît Thibaud
OU ? Au théâtre des béliers
QUAND ? Jusqu’au 4 janvier 2026
DURÉE : 1h20
TARIFS : de 28€ à 38€