
Depuis le 16 janvier, le Théâtre Saint Georges accueille « Du Charbon dans les veines », la nouvelle pièce de Jean-Philippe Daguerre. L’auteur de « Adieu Monsieur Haffmann » et du « Petit Coiffeur » revient avec un nouveau spectacle, succès à Avignon, prenant ses racines dans une ville minière de la fin des années 50 en France.
Pierre et Vladimir sont deux amis qui travaillent, comme leurs pères et les pères de leurs pères, dans la mine de Noeux-Les- Mines. Ils se retrouvent régulièrement auprès de Sosthène, le père de Pierre, et Simone, sa mère, pour un café et un peu d’accordéon. Surtout qu’aujourd’hui est un grand jour : Sosthène a pu se payer un poste de télévision avec l’indemnité donnée par l’entreprise pour sa silicose. Ensemble, ils refont le monde et se trouvent un peu décontenancés par l’arrivée de Mourad et sa famille (dont sa fille Leila) dans la ville…
Cette pièce met en valeur un monde en plein changement dans une société qui pourtant vivait paisiblement depuis des années. Dans le Nord de la France, on est mineur de père en fils. On vit pour la mine et on a du mal à imaginer la vie autrement que telle que l’ont vécue nos aînés. Pierre et Vlad, malgré la possibilité de changer cela, ont décidé de poursuivre leur destin à la manière de celui de leurs parents. Ils ont pourtant sous les yeux les dégâts que fait la mine en la personne de Sosthène, victime de silicose, comme de nombreux mineurs.
Autour d’eux, les premiers postes de télévision, l’arrivée d’une famille arabe dans la ville, la coupe du monde de 1958… Ils observent tout ça avec les craintes que cela crée en eux. Véritablement meurtri par le décès de sa mère, Vlad s’interroge et rejette tout ce qui lui semble trop nouveau. Ses propos racistes du début de la pièce montrent bien l’inquiétude grandissante d’un homme qui ne sait pas que de la diversité peuvent naître de belles choses. C’est à son corps défendant qu’il va être séduit par Leila, sa fraicheur, sa douceur, sa bienveillance. Au fil de l’histoire, ses propos se montreront moins haineux et rejoindront ceux de Sosthène qui expliquait qu’une fois dans la mine, plus aucune différence n’existait entre les hommes. Ne faut-il pas voir le monde comme les « gueules noires » le voyaient ? Un véritable message de tolérance apparaît dans cette pièce.
Jean-Philippe Daguerre nous questionne également sur l’amitié. Entre Vlad et Pierre, entre Sosthène et son ami de toujours, entre Sosthène et son médecin Aimé. Des amitiés fortes, sincères et réelles capables de déplacer des montagnes et surtout de survivre à tous les obstacles. Ce récit nous montre qu’il est possible de laisser de côté ses préjugés, de s’ouvrir aux autres et d’accepter une situation si elle peut rendre l’autre heureux.
La mise en scène sépare le plateau en deux parties : la maison de Sosthène et le cabinet du médecin ou la volière. Les décors apportent l’aspect désuet nécessaire au récit. On est transporté visuellement dans le nord de la France dans les années 50 avec le poste de télévision, la radio, le poêle… Les couleurs ne sont pas grises, elles sont multiples, un jeu de lumière se crée lorsque l’on montre la mine, avec un effet de transparence.
Les acteurs s’impliquent complètement dans leurs rôles, certains allant même jusqu’à jouer de l’accordéon en direct. Mention spéciale pour Jean-Jacques Vanier, Raphaëlle Cambray et Jean-Philippe Daguerre que l’on suit avec grand plaisir dans cette aventure. « Du Charbon dans les veines » est une pièce qui parle à nos racines, dans un monde qui devrait parfois s’inspirer de l’ouverture d’esprit de ces personnages.
Audrey C.
Auteur et metteur en scène : Jean-Philippe Daguerre
Avec : Jean-Jacques Vanier, Aladin Reibel, Raphaëlle Cambray, Théo Dusoulié, Julien Ratel, Juliette Béhar, Jean-Philippe Daguerre.
Décors : Antoine Milian
Costumes : Virginie H
Musiques : Hervé Haine
Assistant mise en scène : Hervé Haine
Lumières : Moïse Hill
Co-productions : Ki m’aime me suive, Grenier de Babouchka et Place 26
Soutiens : CourbevoiEvent pour l’Espace Carpeaux, Petit Théâtre de Rueil-Malmaison, Centre culturel Jean Vilar – Marly-le-Roi.
Où ? Au Théâtre Saint Georges 51 Rue Saint-Georges 75009 Paris
Quand ? DU 16 JANVIER 2025 AU 26 AVRIL 2025
du mercredi au samedi à 19h / le dimanche à 15h
Tarifs : de 10€ à 48€
Durée : 1h20
Chronique publiée le 05/ 02/2025 sur La rue du bac.